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Claire Obscurité
5 janvier 2011

Paradoxes éternels de Zénon d'Elée

Le contraste chez Zénon est entre deux représentations qui visent l’une et l’autre à la rationalité, entre la continuité de la sphère parménidienne et la discontinuité du monde pythagoricien. Cette disconti­nuité est absurde ; en effet, composer le multiple d’unités sans grandeur ou de points, c’est le composer de riens ; mais donner à chaque unité une grandeur, c’est dire qu’elle n’est pas l’unité, p.66 puisqu’elle est alors composée. De plus, comment, si le point, ajouté à une grandeur, ne la rend pas plus grande, pourrait‑il être le composant de cette grandeur ? Enfin, à supposer une grandeur faite de points, il y aura entre deux de ces points une grandeur qui devra être faite d’autres points, et ainsi à l’infini [1]. Ajoutons les célèbres arguments par lesquels Zénon démontre l’impossibilité du mouvement, dans l’hypothèse où une grandeur est faite de points : l’argument du coureur : il est impossible que le coureur arrive au bout du stade puisqu’il doit franchir une infinité de points. Achille et la tortue : Achille poursuivant la tortue ne la rattrape pas, puisqu’il doit d’abord atteindre la place d’où la tortue est partie, puis en repartir pour atteindre la place où elle est actuellement, et ainsi à l’infini, s’il est vrai que la distance entre lui et la tortue sera toujours composée d’une infinité de points. Argument de la flèche : à chaque moment du temps, la flèche qui vole occupe un espace égal à elle‑même ; elle est donc à chaque instant en repos, si l’on suppose que le temps est composé de moments indivisibles. Argument du stade : si deux coureurs se meuvent avec une rapidité égale en sens opposé et se rencontrent en passant devant un objet immobile, ils se mouvront, l’un par rapport à l’autre, deux fois plus vite que par rapport à l’objet ; or, à supposer que les corps soient composés de points et que l’intervalle d’un point à un autre soit franchi en un instant indi­visible, il s’ensuivra que pour le coureur l’instant nécessaire pour passer d’un point de l’objet immobile au point suivant sera moitié de l’instant nécessaire pour passer d’un point de l’autre coureur au point suivant [2]. En définitive, c’est donc bien la sphère continue de Parménide que Zénon défend contre les pythagoriciens.

 


[1] Frag. 1 à 3 (dans DIELS, Die Vorsokratiker).

[2] ARISTOTE, Physique, VI, 9, 239 b 8 aq.

Bréhier, ibidem

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Claire Obscurité
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